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MARK ETC

Résidence de création - 1er > 12 mars 2021  

Mark Etc est accueilli en résidence de recherche du 1er au 12 mars 2021 pour un travail autour du spectacle Faute de tout pour faire un monde


Mark Etc est artiste et diplômé en esthétique de l’art. Ses premières interventions utilisent l’image projetée en espace public. Il crée en 1993 le groupe ICI-MÊME, met en scène treize créations et dirige une cinquantaine d’interventions in situ. Partageant son activité entre créations nationales, interventions territoriales et ingénierie culturelle et politique, sa démarche artistique vise à expliciter les sous-jacents et non-dits des systèmes dominants dans des dystopies immergées dans la réalité urbaine. 

CONVERSATION


Poids ?
« Plume ». Je pèse 68 kg. Je suis né le 1er Mai 1968, il y a sûrement un lien. 

Il y a aussi un lien avec le fait d’être un poids plume. Sans vouloir trop charger le poids de l’histoire, les utopies de ces années semblent quand même bien éventées, dissipées. Cette relation du poids au temps, je veux la souligner. Je trouve qu’on n’a pas gagné grand chose et donc qu’on ne pèse pas grand chose. Dans une séquence humaine, la génération ne pèse pas grand chose. Elle pèse quand même suffisamment pour compromettre son cadre de vie. J’ai la légèreté de penser que je ne pèse pas grand chose, parce que si l’art changeait la vie ça se saurait. Je ne crois pas à cette idée même si moi ça m’a changé.


Quelle est la genèse du projet ?
Rebrousser un peu le temps, pour comprendre pourquoi on en arrive à une époque où nous savons que l’impact sur notre milieu de vie peut être tel qu’on compromet tout simplement notre capacité à nous maintenir. C’est vieux comme le monde, mais nous sommes quand même une espèce comme les autres mêlés dans un dialogue que l’on pourrait entretenir inter-espèces. Ce qui nous nourrit, dans nos organes, notre corps, les bactéries, les enzymes, en témoignent.
Le projet a cette origine. Il vient de là. Vouloir fouiller dans le passé pour moi ce n’est pas pour accumuler des preuves irréfutables de quelque chose, par exemple d’une prédisposition humaine à l’autodestruction, ce genre de grandes questions qui ont eu leur réponse y compris par le théâtre. C’est plutôt une manière de s’intéresser à la façon dont on se représente dans le monde.


Pourquoi le 3 bis f pour ce projet ?
Concrètement, Faute de tout pour faire un monde offre au spectateur de revisiter des époques à travers le subterfuge d’un voyage dans le temps. Cela se passe dans une maison. Une maison allégorique, constituée de pièces. Au 3 bis f j’ai envie de traiter du grenier parce que je vois bien que par la nature de cet espace, il y a quelque chose à jouer dans la relation à la psyché. J’ai envie de parler de mémoire.
Ce voyage dans le temps va faire constater que le monde est d’abord affaire de représentations.


Comment travailles-tu ?
Immersion. Je lis, je me documente. Beaucoup d’essais, pas tellement de fictions. Cependant, il y’a des choses qui reviennent dès qu’on se confronte à l’anticipation, la SF… Dans un second temps, je travaille au plateau en équipe. Je partage ces références, je vais assez loin dans la déconstruction de ce que j’imagine.
Avant de faire du théâtre je m’intéresse à ce qui fait relation, à ce qui peut être provoqué dans un espace public. Nous travaillons sur des canevas, parfois très écrits, parfois basés sur l’improvisation. Je suis ouvert à ce que nous travaillions collectivement dans ce moment-là. C’est très jubilatoire, excitant et en même temps anxiogène. Il faut arriver à tenir son sujet, à être compris et à amener quelque chose d’intéressant. À un moment donné, j’arrive à avoir une vision. Tout se met en place progressivement.


Comment cohabites-tu avec ta folie ?
« En toute inconscience »
Je pense à Wittgenstein : « est ce que mes jambes existent sous la table si je ne les considère pas ? » J’ai bien conscience qu’il y a quelque chose de ce côté-là, mais je ne m’y intéresse pas. Je la perçois moins comme une altération que comme un alter ego. C’est pour moi un continent, un iceberg. C’est immergé. C’est une notion très polysémique, très sociale. C’est aussi une affaire de représentations et d’expression : puisqu’on la nomme tel un désordre, au moins aux yeux de ceux qui trouvent ordre et un agencement au monde qui les entoure.


Ton jardin préféré ?
J’ai pensé tout de suite, exubérance. A priori mon jardin préféré est moussu, humide, odorant. Il est charnel, fourmillant, infini. Dans tout ce qui est charnel il y a quelque chose de fusionnel, c’est une relation au monde, à la planète terre.
Du jardin, je passe plutôt au parc et du parc je me suis dit que j’aimais bien converser, marcher avec quelqu’un. Il est venu un peu un modèle de jardin que j’aime en promenade : ces jardins terrassés, en restanques : ils offrent un spectacle à voir. L’idée de partager une vue me plait.
Il y a aussi les jardins urbains. Dès que je rentre dans un jardin ce qui m’intéresse en vérité, ce sont les gens qui s’y trouvent, les événements. J’aime bien regarder, j’aime bien quand ça me relie. Mon jardin préféré est un lieu qui me met en relation.


Quelle langue voudrais-tu chatouiller avec tes cils ?
Un pangolin. Un animal radicalement différent. La belle et la bête.
La langue des signes.
La langue d’un enfant peut-être.


A quelle question répondrais-tu « A vous de voir » ?
 En général, je n’aime pas esquiver les questions. Je pense que la fonction d’artiste est d’amener aux questions. Je n’aime pas y répondre non plus, même si je peux avoir un point de vue. Je serais tenté de dire : « quelle est la question ? ». Si on me répond « à vous de voir » je me dis « mon travail a marché ». Cette question ouvre celle de la subjectivité